Faut-il faire un site web mobile ? Faut-il faire de la vidéo ? En tant qu’occidentaux, nous avons une vision biaisée de la façon dont les internautes/mobinautes consomment les contenus en ligne. Et les deux questions énoncées ci-dessus sont peut-être des mauvaises questions.
Quelques chiffres sur les tendances mobiles
- Les ventes de smartphones et de tablettes ont dépassés les ventes d’ordinateurs depuis 2011 au niveau mondial.
- Les tablettes sont délaissées au profit des mobiles à grand écran.
- En France presque un habitant sur deux dispose d’un smartphone et quasiment tout le monde dispose d’un téléphone mobile (bien plus que ceux qui ont un ordinateur). Source : Insee
- Les personnes âgées, longtemps à la traîne, rattrapent leur retard en équipement mobile et accès internet.
- La majorité des moins de 25 ans affirment pouvoir se passer d’ordinateur mais pas de téléphone.
- Le premier réflexe de beaucoup de possesseurs de smartphones au réveil est de consulter leur téléphone.
- Les applications spécialisées ne sont pas tant utilisées que ça (hormis les vraiment utiles – itinéraires, organisation de voyages et les applications sociales). Un utilisateur standard a une quarantaine d’applications installées et se sert réellement de 5 seulement.
- Les contenus sont consommés différemment en fonction du moment de la journée (mobile = transport + le soir dans le canapé, ordi = au bureau + achats importants).
- Le format vidéo est plébiscité par les utilisateurs et les 15-24 ans passent plus d’une heure par jour devant Youtube seul (sans parler des vidéos sur les réseaux sociaux).
Par rapport à tous ces points, l’approche « faut-il un site web mobile ? » est dépassée. Avec plus d’1,3 milliards de smartphones vendus en 2021, il est évident que tout contenu doit aujourd’hui est accessible en ligne peu importe le périphérique. En quelques années, on est donc passé à travers différentes étapes :
- des sites web conçus pour ordinateurs avec des contraintes de résolution (qui se souvient des mentions en pied de page « optimisé pour 800*600 » ?)
- des sites web en différentes versions (accès bas débit – accès haut débit mais aussi site classique – site mobile – appli à télécharger)
- des sites web déclinables sur tous supports grâce aux design adaptif (ordinateur, tablette, mobile, télé connectée…)
Certains pays riches d’Asie ainsi que la plupart des pays en développement utilisent très majoritairement le smartphone. Des usages spécifiques se développent avec des meta-applications mobiles ayant de multiples usages et complètement inconnus en Europe (paiement, discussion, social, commerce social). Dans de nombreux cas d’usage, il n’est même plus question de version ordinateur. On est très loin de l’approche encore classique en Europe ou les agences web proposent des maquettes ordi qui sont ensuite (mal) déclinées sur mobile.
Quelle approche aujourd’hui ? Mobile-only ? Mobile-first ? Responsive design ?
De façon plus large, il surtout est important de créer des supports qui permettent de diffuser le contenu (texte, multimédia) de la façon la plus agréable possible pour le consommateur de contenu. C’est une évidence. Et pourtant.
Cela peut se faire via :
- Des mécanismes d’adaptation du contenu à la taille de l’écran (site web responsive). Stats par type d’appareil à l’appui pour argumenter, il faut alors cibler d’abord le mobile (mobile-first) et prévoir une déclinaison correcte sur ordinateur. Dans certains métiers, l’approche mobile-only est une évidence (voyage et tourisme lorsque les utilisateurs sont en mobilité).
- Par l’ouverture de son contenu aux webservices afin de permettre la diffusion de son contenu de façon automatisée et organisée (APIs). Les technos headless sont la direction dans laquelle aller afin de libérer le contenu de son carcan.
- L’utilisation de métadonnées (microformats – couche sémantique). C’est une bonne pratique de conception web même si la crainte de voir ses propres contenus aspirés sans retour d’ascenseur reste un risque bien réel. Peut-on néanmoins se permettre de ne pas le faire quand la concurrence le fait ?
- Des standards de diffusion de contenus (flux RSS) ou des formats dédiées comme le feu AMP. Certains les utilisent encore…
Le contenu peut alors être organisé, agrégé, retravaillé sans être dénaturé et diffusé sous diverses formes pour correspondre aux différents usages. La forme devient moins importante ou disparaît pour ne laisser que l’essentiel : le message. Ça gêne les partisans d’un contenu dont la forme ne doit pas être dissociée du fond. C’est vrai, il y a une perte ou une standardisation de la forme. C’était flagrant avec le format AMP par exemple. Laissons les anciennes pratiques s’éteindre avec les dinosaures du web et soyons là ou sont les internautes : sur mobile, sur les réseaux sociaux et faisons le choix de délivrer un contenu idéal pour une bonne expérience plutôt qu’un contenu parfaitement maîtrisé mais difficile à consommer pour l’utilisateur.
Il y a quelques années, l’approche responsive était déjà incontournable. Elle l’est toujours et fait partie des pratiques de base même si la bascule vers le mobile-first est loin d’être acceptée. Les métadonnées étaient à la mode. Aujourd’hui, c’est surtout un passage obligé et c’est vu comme du temps supplémentaire pas très valorisé. Ce qui est vraiment nouveau c’est le headless : la promesse est belle et répond parfaitement à des problématiques concrètes (diffusion partout, IoT, IA).
Ce qui va certainement tout changer c’est la génération de contenu par l’IA. Dans la chaîne de production de contenus, le texte et dans une moindre mesure la vidéo étaient les grands vainqueurs. Maintenant que l’on peut générer en quelques clics des contenus d’un média à l’autre (texte -> vidéo, texte -> audio mais aussi l’inverse) et que les internautes délaissent le format texte, le headless s’affirme encore un peu plus comme une réponse pertinente à condition de pouvoir diffuser réellement en multimédia et multi-support. Dans un monde ou la consommation de vidéo est la réponse aux attentes de contenus des utilisateurs, la question de faire un site web n’est-elle pas un peu étriquée ?
Au final, peu importe la manière dont le contenu est consommé : ce qui compte c’est que l’information arrive dans un format adapté jusqu’à son destinataire. Les mashups et agrégateurs de contenus des années 2000 ont été un pas visible en ce sens. Le responsive design a été une brique essentielle. Aujourd’hui le contenu se consomme sur petit écran et via des intermédiaires et hubs d’information (app et réseaux sociaux) et le headless semble très prometteur. Qu’en sera-t-il dans 5 ans avec la déferlante IA et la promesse des médias immersifs ?